Le compte en banque relationnel est un concept imaginé par Dr Susan Friedman. Jenifer Zeligs en parle également dans son ouvrage Animal Training 101. Elles décrivent la relation que nous entretenons avec nos chevaux comme un compte bancaire. Quand vous travaillez vos chevaux, effectuez-vous des dépôts dans le compte bancaire ou faîtes-vous des retraits ?
Le compte en banque relationnel
Quand vous souhaitez acheter quelque chose, regardez-vous l’état de votre compte bancaire ? Si vous avez économisé un peu, vous avez quelque chose à dépenser. D’un autre côté : que ressentez-vous si votre compte est négatif et que vous n’avez plus rien à dépenser ? Cela vous cause-t-il du stress ou de la frustration ? Je pense que nous sommes tous d’accord sur le fait qu’il est judicieux d’économiser avant que notre compte n’atteigne zéro. Il en va de même pour nos chevaux !
Dans sa vie domestique, notre cheval vivra de nombreuses expériences. Nous souhaitons qu’il ne vive que des expériences positives mais il se peut qu’il se retrouve aussi face à des expériences négatives : notre cheval tombe gravement malade et nous devons l’emmener d’urgence en clinique, notre cheval s’arrête plein milieu d’une route passante et on doit utiliser un stick pour le faire avancer rapidement… Nous n’avons souvent pas le choix dans ces moments-là. Il me semble important de prendre conscience que nous ne sommes pas parfaits, que les situations négatives sont multiples et qu’il est dans notre devoir de préparer le cheval un maximum (par du medical training, de la désensibilisation, etc.) et de venir enrichir nos relations au quotidien.
Le processus de développement des relations est très complexe car il n’est généralement pas le résultat d’un seul évènement associatif, mais le résultat cumulé de toutes les associations significatives entre deux individus. En ce sens, nos relations avec nos chevaux sont similaires à un compte en banque. Le principe du compte en banque relationnel est alors simple : faire des dépôts réguliers et éviter les retraits le plus possible.
En utilisant un modèle arithmétique de conditionnement classique, on peut voir comment l’association à des évènements agréables de grandes valeurs rend le compte en banque relationnel très positif, ou inversement, être associé à des évènements fortement aversifs peut être considéré comme un retrait.
En d’autres termes, chaque fois que nous mettons en place des choses que le cheval apprécie ou aime faire, nous plaçons des dépôts dans le compte bancaire. A l’inverse, chaque fois que nous mettons le cheval dans une situation inconfortable où il va ressentir de la douleur, de la peur, de l’anxiété ou un niveau de stress élevé, nous effectuons des retraits.
Comment se porte notre compte en banque relationnel ?
Nous disposons d’un conseiller bancaire : notre cheval. Lui seul peut nous indiquer où en est notre compte en banque.
Signes d’abondance de crédit (vert)
Notre cheval est curieux et heureux de faire des efforts et de travailler pour nous. Il fait preuve de beaucoup d’efforts, est engagé mentalement, fait preuve d’initiative. Il nous suit librement et vient à notre rencontre dans le pré.
Signes d’augmentation du crédit (vert clair)
Notre cheval est attentif, détendu, réactif, et ne s’éloigne pas lorsque nous l’abordons au pré.
Signes de crédit décroissant (rouge clair)
Notre cheval montre un manque d’effort et d’intérêt, est lent dans ses réponses ou montre des signes de tension ou d’anxiété. Il ne tente pas de comprendre, n’est pas assez détendu ou intéressé pour réfléchir ou réagit instinctivement à nos aides (avec fuite, combat ou « freeze »).
Signes de déficit envers votre cheval (rouge)
Nombreux signaux de stress et de peur. Notre cheval abandonne avant même d’essayer, a peur de faire des erreurs ou est dans un état d’impuissance acquise. Il se détourne de nous lorsque nous nous approchons de lui et veut éviter d’être sellé ou brossé.
Tout le monde avec des chevaux sera confronté à tous les signaux ci-dessus d’une manière ou d’une autre à un moment donné. Nos relations avec nos chevaux sont évolutives et le solde de notre compte en banque relationnel est dynamique. Chacune de nos interactions peut venir modifier l’état de notre compte en banque. À long terme, nous voulons développer beaucoup de crédit et rester dans la zone verte dans la mesure du possible.
Comment faire des dépôts sur le compte en banque relationnel ?
Veiller au respect de ses besoins fondamentaux
Avant de parler d’entraînement du cheval, il est important de respecter son bien-être au quotidien : accès à du fourrage, possibilité d’être en liberté quotidienne, avoir des contacts sociaux, posséder un matériel adapté, lui procurer les soins adéquats.
Connaître votre cheval et savoir ce qui le rend heureux
Friandises, récompenses vocales, se reposer, aller en balade, faire du travail au sol, toucher des objets, mâcher quelque chose, se tenir debout sur quelque chose ou simplement ne rien faire ensemble. Tous les chevaux n’aiment pas les mêmes choses et cela peut changer avec la situation.
Incorporer du renforcement positif dans nos techniques
Si la majorité du temps la relation que nous entretenons avec notre cheval se fait par conditionnement classique, il est important d’associer les comportements / mouvements à des émotions positives.
Utiliser du contre conditionnement
Le contre conditionnement et la désensibilisation systématique sont recommandés pour changer la manière dont le cheval se sent face à des objets / situations qui lui font peur.
Préparer le cheval aux réalités de sa vie domestique
Le medical training ou tout autre activité de désensibilisation aidera le cheval à gérer ses peurs lors des soins médicaux et des évènements angoissants (le van, les balades en extérieur, etc.)
Mettre en place des alternatives à la punition
Quand notre cheval se comporte d’une manière que nous n’apprécions pas, au lieu de le punir, nous pouvons lui apprendre un comportement incompatible, rediriger son comportement ou bien modifier l’antécédent.
Finalement, que devez-vous retenir ?
Choisir de repenser la relation comme un compte en banque est interessant pour mieux comprendre nos interactions quotidiennes et l’origine de certains comportements. Par exemple, très souvent, un cheval qui ne se laisse plus approcher en pâture est un cheval en déficit relationnel, à cause des retraits que nous avons pu faire auparavant par mégarde. Il me semble alors nécessaire de porter un fort intérêt aux associations que le cheval peut faire avec certains évènements et avec nous-mêmes, par le biais du conditionnement classique. Enrichir le plus possible notre relation, préparer notre cheval aux futurs expériences négatives, remettre en question nos techniques, c’est rendre nos relations avec nos chevaux durables dans le temps.