Il existe plusieurs techniques pour gérer au mieux les comportements indésirables de votre cheval. Avant toute chose, n’hésitez pas à consulter un vétérinaire pour éliminer l’hypothèse que votre cheval exprime ces comportements parce qu’il se trouve en souffrance. Parfois un rendez-vous avec un ostéopathe ou dentiste peut aussi s’avérer utile. Ensuite, essayez de comprendre pourquoi votre cheval agit de cette façon. N’utilisez pas de l’anthropomorphisme comme « Il le fait exprès » . Ces idées reçues vous prédisposent à penser punition au lieu de trouver une solution bienveillante.
Essayez dans un premier temps de répondre à ces questions :
- De quelle façon le comportement est-il renforcé ? Regardez quelles conséquences suivent le comportement indésirable.
- Existe-il un « pattern » au comportement indésirable ? Quand se produit-il ? A quelle fréquence ? Essayez d’identifier ce qui a provoqué le comportement indésirable en premier lieu.
- Ce comportement est-il causé par des antécédents / traumatismes ? Faites un point sur les associations négatives faites par votre cheval les années précédentes.
- Est-ce que ses besoins fondamentaux sont assouvis ?
- Est-ce que ce comportement indésirable peut être expliqué par l’éthologie ? Certains comportements que nous jugeons indésirables font partie du répertoire comportemental du cheval.
Dans cet article, nous nous focaliserons uniquement sur la gestion de l’environnement. Dans les prochaines semaines, vous découvrirez d’autres techniques à mettre en place !
Gestion de l’environnement
La gestion d’environnement, appelée également arrangement des antécédents, consiste à créer un environnement propice pour que le cheval ne présente pas/plus un comportement indésirable. Cette approche fait partie des approches les moins intrusives selon la hiérarchie LIMA de Susan Friedman (Less intrusive, minimally aversive).
L’antécédent du comportement est ce qui apparaît juste avant le comportement. La conséquence est ce qui se passe juste après le comportement, c’est ce qui le renforce et le rend plus susceptible de se produire à nouveau. L’idée avec l’arrangement des antécédents, c’est de… gérer les antécédents.
Exemples concrets
Premier scénario
A chaque fois que Sarah veut nourrir ses chevaux, elle ouvre la porte de la réserve à granulés pour préparer les rations. Son cheval, Titan, la voit ouvrir la porte et systématiquement, il se met à taper de l’antérieur la porte de son box jusqu’à ce que Sarah lui donne sa ration.
- Antécédent : la porte de la réserve à granulés
- Comportement : taper dans la porte du box
- Conséquence : nourriture
A travers le conditionnement classique, Titan a associé la porte de la réserve à granulés avec la nourriture et il a donc commencé à taper dans la porte du box par excitation dès que Sarah y entrait. Sarah a renforcé positivement cette action en donnant systématiquement la ration à Titan.
Dans ce cas de figure, arranger l’antécédent reviendrait à éviter que Titan tape dans la porte de son box dans un premier temps. On pourrait changer l’emplacement de la réserve à granulés (pour qu’elle soit hors de vue de Titan) ou alors préparer la ration en avance pour qu’il n’associe plus la porte de la réserve à granulés avec la nourriture.
Il est aussi important de noter que taper dans le porte du box peut être considéré comme un signe de stress ou d’excitation, ce qui indiquerait que Titan n’aurait pas un management approprié : il se peut qu’il n’ait pas assez de fourrage dans son alimentation et qu’il ait passé plusieurs heures sans nourriture avant de manger ses granulés. Ce comportement aurait probablement pu être évité si Titan avait accès à du fourrage en permanence.
Deuxième scénario
Le cheval de Chloé passe souvent sa langue au dessus de son mors quand il est monté. C’est pour cette raison que Chloé ne se sent pas en sécurité et a des difficultés à diriger son cheval.
- Antécédent : le filet
- Comportement : mettre la langue au dessus du mors
- Conséquence : soulagement du mors
De nombreux cavaliers utilisent un mors pour contrôler les mouvements de leur cheval, en parallèle de l’utilisation de renforcement négatif et de punition positive. Certains chevaux ont trouvé comme solution de passer leur langue au dessus du mors pour atténuer la douleur.
Dans ce scénario, arranger l’antécédent reviendrait à enlever le mors et passer à une bride sans mors. Le cheval de Chloé ne pourrait donc plus passer sa langue au dessus du mors et surtout il n’en aurait plus besoin. La monte sans mors permettrait au cheval de Chloé d’être plus confortable au travail.
Chloé devrait aussi vérifier si le mors n’a pas blessé la langue de son cheval, sa bouche et ses dents. Pour cela, un rendez-vous avec le dentiste pourrait être envisagé.
Les avantages de cette technique
Cette technique pour gérer un comportement indésirable présente de nombreux avantages tels que :
- Ça met en sécurité le cheval (on limite les blessures)
- Ça préserve son hébergement (pas de porte du box à trou)
- Ça nous permet de redescendre en pression
- Ça crée un contexte favorable pour travailler correctement : si le cheval de Chloé a sa langue par dessus son mors, il ne peut plus travailler dans de bonnes conditions. L’arrangement des antécédents est primordial pour pouvoir créer un plan d’entraînement efficace.
Certains trouveront que cette technique est « trop facile » mais ici le but est de créer un environnement qui permettra au cheval d’apprendre ensuite. On peut recréer des zone safe pour déconstruire le comportement qui nous pose problème et le retravailler dans le calme et la décontraction. Le cheval de Chloé pourra sûrement être retravaillé avec un mors plus tard, à condition qu’il soit adapté à sa bouche et qu’il n’ait plus d’associations négatives avec cet outil. Titan pourra attendre sa nourriture dans le calme si on déconstruit cette association avec la porte du local et s’il est nourrit convenablement en parallèle.
Finalement, que devez-vous retenir ?
On facilite la vie à notre cheval mais on facilite aussi la nôtre. Arranger les antécédents de certains comportements, c’est concentrer notre énergie, notre temps et notre motivation sur d’autres comportements qui sont prioritaires à travailler parce qu’on ne peut pas être partout à la fois. Par ailleurs, lorsque votre cheval présente le comportement problématique, il se renforce dans ce comportement. En refusant d’arranger les antécédents, vous lui apprenez à solidifier le comportement que vous rêvez de voir disparaître. Vous lui apprenez précisément l’inverse de ce que vous voulez car le comportement sera de plus en plus difficile à travailler. Pour terminer, choisissez de créer des contextes favorables à l’apprentissage de vos chevaux plutôt que de les mettre en échec. Ça n’empêche pas de bosser à côté, au contraire, ça vous permet juste de le faire confortablement 🙂